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LES
BATAILLES A REICHSHOFFEN

Contexte
En 1664, le domaine de Reichshoffen
est vendu aux ducs de Lorraine, qui récupèrent
ainsi par l'or ce que leurs ancêtres avaient perdu par
le fer. Sans se dessaisir de leur
suzeraineté, les ducs octroient à plus d'un de leurs
proches la jouissance passagère
de ce beau domaine : tel le prince Vaudémont et le
prince de Craon. Mais la maison
de Lorraine est appelée à de plus hautes destinées.
François Etienne est élu empereur
d'Allemagne sous le nom de François Ier. En 1761, il
vend sa terre de Reichshoffen
au maître de forges de Niederbronn, le baron Jean de
Dietrich, possesseur d'une
immense fortune et un des plus grands
propriétaires terriens de la province.
Le nouveau seigneur fit de Reichshoffen une résidence
première. Il jeta bas les
ruines du vieux château et construisit en 1769, un beau
château moderne qui ne
désemplit pas d'hôtes de qualité.

Borne (située au collège de
Reichshoffen) indiquant les armes du Duc de Lorraine,
seigneur du domaine de Reichshoffen de 1664 à 1761.
Selon la tradition, les armoiries sont en souvenir de la
première croisade lorsque
Geoffroy de Bouillon tua d'un seul trait trois oiseaux.
Cette prouesse, considérée comme un signe divin, lui
permit de devenir Roi de
Jérusalem.
Le blason lorrain est orné avec trois alérions (petits
aigles, sans bec, ni serres)
qui symbolisent ici Dieu qui est un et trois à la fois
(alérion = anagramme de Loreina).
Ses trois couleurs : or, rouge et argent, représentent
respectivement les richesses
matérielles et spirituelles, le combat et la gloire, la
pureté.
En 1779 on y célébra par de fastueuses réjouissances,
l'union du jeune prince
de Nassau-Sarrebrück (12 ans) avec Mademoiselle de
Montbarey (18 ans) :
«mariage dont tout le monde se crut le droit de causer»
nous conte la baronne
d'Oberkirch (Baronne d'Oberkirch, Mémoires, chapitre
VI). La tourmente
révolutionnaire épargna le château de Reichshoffen,
mais les guerres de la
Révolution et de l'Empire vidèrent la maison de son
mobilier.
En livrant bataille contre les Impériaux en 1793, Hoche
s'arrêta une nuit, dit-on,
au château de Reichshoffen, dont les murs de la façade
nord conservent encore
les traces d'un boulet.
En 1814 Blücher passa la nuit au château avant
d'entreprendre la campagne de
France.
En 1815 Wellington, se rendant de Paris au congrès de
Vienne, s'arrêta pendant
deux jours au château et passa une grande revue dans la
plaine qui s'étend de
Gundershoffen à Gumbrechtshoffen.
Le château de Reichshoffen a hébergés au cours des
derniers siècles, rappelons
surtout les dates du 22 décembre 1793 et du 8 août 1870
(la première étant sans
doute moins connue que la seconde).
C'est en effet dans notre région,
que s'est joué
en moins d'un siècle le sort de l'Alsace.
Coïncidence du lieu des événements, les deux batailles
eurent lieu à
Froeschwiller. Il est probable que l'Empereur Napoléon
III avait indiqué au
maréchal Mac-Mahon cette position comme le point sur
lequel il devait
concentrer ses forces et présenter la bataille à
l'ennemi là où Hoche remporta
la victoire sur l'armée autrichienne aux ordres de
Wurmser.


LA
BATAILLE DU 22 DECEMBRE 1793


Portrait du général HOCHE.
La Bataille du 22 Décembre 1793. A la fin du mois
d'octobre 1793, les deux
armées que la République Française opposait aux
coalisés (Autrichiens et
Prussiens), sur les frontières de l'est, l'armée de la
Moselle et l'armée du Rhin
semblaient incapables d'une longue et vigoureuse
résistance. Que de fois
les Austro-Prussiens eurent-ils l'occasion de mettre en
déroute les armées
républicaines !
Dès cette époque, certains princes allemands pouvaient
venger les affronts
qu'ils avaient reçus de Louis XIV et qu'ils n'avaient
jamais oubliés. Mais la
Prusse et l'Autriche n'étaient plus alliées que de nom
: la première craignait
l'agrandissement de la seconde et ne la secourait plus
que très mollement.
D'autre part, la guerre souffrait de la mésintelligence
inévitable de Brunswick
et de Wurmser. Brunswick, prudent à l'excès, pesait
tout, n'agissant que
d'après les principes et invoquait à chaque instant la
méthode. Wurmser
plus spontané que Brunswick, préférait les coups de
mains aux entreprises
savamment combinées. Wurmser avait fait construire
vingt-sept ouvrages
fortifiés de Drusenheim à lembach, en passant par
Bischwiller, Marienthal,
Schweighouse, Mietesheim, Uttenhoffen, Gundershoffen,
Reichshoffen,
Froeschwiller, Woerth et Goersdorf. Son quartier
général était à Haguenau.
Sur tous ces points, il y eut chaque jour, jusqu'à, la
mi-décembre des
engagements plus ou moins importants ne valant aux
républicains d'autres
avantages que de fatiguer, d'user et d'exaspérer les
Autrichiens et les
Prussiens. C'est alors que Hoche entre en scène pour
imprimer aux opérations
un élan nouveau. Il remplace différents généraux qui
pendant les opérations
précédentes n'étaient pas à la hauteur de leur
mission. Il confie le
commandement de sa droite au général Moreau, celui du
centre à Grangeret
et celui de la gauche à Taponier. Il prit le parti
d'enfoncer la ligne
autrichienne entre Niederbronn et Reichshoffen. S'il
menait à bien cette
opération, il se trouvait d'un coup sur la route directe
de Landau et en même
temps il faisait tomber la ligne de défense Haguenau -
Drusenheim.
La position autrichienne qui s'étendait de Gundershoffen
au Liebfrauenberg
était particulièrement solide. Trois redoutes étaient
construites sur la rive
gauche du Falkensteinerbach entre Gundershoffen et
Reichshoffen, une sur
la route de Reichshoffen à Froeschwiller, une
directement au nord de ce
village, presqu'à la sortie et contre le chemin de
Langensoultzach, une autre,
exactement située à l'emplacement du monument
français, une à l'est de
Woerth près du chemin de Goersdorf et enfin une série
de retranchements
très importants sur le Liebfrauenberg. Presque tous ces
ouvrages étaient
armés de pièces de gros calibres. Le 22 décembre de
grand matin Hoche
partit de Niederbronn, se dirigea par le Jaegerthal sur
Froeschwiller.
La lutte s'engagea dans la forêt située au nord-est de
Froeschwiller.
Pendant que la division de Taponier bouscula les
positions autrichiennes
à Froeschwiller, Hoche avait marché avec deux de ses
divisions sur
Reichshoffen.
A la vue de ces "redoutes étagées, entourées de
fossés profonds et toutes
hérissées de palissades et de fraises", les
troupes républicaines
témoignèrent de l'hésitation, quelques hommes
crièrent même à la trahison.
Alors le général en chef Hoche les ranima par une de
ces plaisanteries
qui sont toujours d'un grand effet sur le champ de
bataille : Camarades,
s'écria-t-il en parcourant les rangs, à six cents
livres pièce les canons
autrichiens ! Adjugé, répondirent gaiement les soldats,
qui s'élancèrent
aussitôt à la baïonnette, mettant en fuite les
bataillons autrichiens,
enlevant les redoutes avec seize canons, vingt caissons
et faisant cinq
cents prisonniers. Le nombre de leurs morts fut
considérable. La prise
de Reichshoffen et surtout de Froeschwiller changea la
face des choses.
La trouée était faite et le système défensif de
Wurmser était anéanti.
Dès le 23 décembre ces divisions de l'armée du Rhin
qui jusqu'alors
piétinaient impuissantes et se consumaient en stériles
tâtonnements,
se mirent en marche. Desaix entra à Drusenheiin, puis
s'achemina sur
Seltz, tandis que Combez tint l'adversaire en respect
devant la tête de
pont de Fort Louis. Michaud fouilla la Forêt-Sainte où
il ne rencontra que
des patrouilles isolées, et marcha sur Hatten. A gauche
de Michaud, Ferino
se porta sur Oberbetschdorf. A gauche de Ferine, Hatry se
dirigea sur Soultz.
"Les Français doivent faire la guerre d'une
manière leste et révolutionnaire",
disait Hoche. Pousser en avant et refouler l'adversaire,
tel était le mot d'ordre.
N'est-ce pas remarquable de voir Hoche, naguère caporal
aux gardes
françaises, devenu général en chef, attaquer
journellement durant plus
d'un mois et arracher une victoire éclatante ?


Les cuirassiers de Reichshoffen
(peinture)

LA
BATAILLE DU 6 AOUT 1870

A cette époque le curé catholique à Reichshoffen
pendant la guerre de 1870,
s'appelait DIEMERT Jean-Baptiste, né à Maennolsheim le
22/05/1809, décédé
à Molsheim le 11/03/1890. Il a été nommé chevalier de
la Légion d'honneur
par décret du 16/11/1871, mais son dossier ne mentionne
pas la raison de
cette nomination. On peut supposer que cette nomination
à un rapport avec
les batailles qui eurent lieu dans les environs en 1870.
(© SB FX -
source : une internaute)
La bataille de Reichshoffen... "Cuirassiers dits de
Reichshoffen", voilà
l'inscription que porte le monument érigé au-dessus de
Morsbronn en souvenir
de la fameuse charge du 6 août 1870. N'engageons pas la
polémique sur la
dénomination exacte de cette bataille. Les Allemands
désignent l'ensemble
des combats sous le nom de bataille de
Froeschwiller-Woerth ; le général
Bonnal, historien français et témoin oculaire ainsi que
le pasteur Klein de
Froeschwiller, auteur d'un ouvrage plus romancé,
emploient l'expression
" bataille de Froeschwiller " ; le quartier
général du maréchal Mac-Mahon
était situé au château du comte de Leusse et
l'Etat-major mentionnait dans
ses rapports le nom de Reichshoffen, ce qui explique
aussi pourquoi le manuel
d'Eugène de Monzie, publié avec carte et pièces
officielles en 1876, porte
le titre " La journée de Reichshoffen ".

Le soir de la bataille en été
1870, Le prince Frédéric-Guillaume défile dans les
rues
de Froeschwiller.
Il n'y a donc pas lieu de contester le lieu de
l'engagement et de parler d'erreur
historique, mais de mettre en relief ce fait d'armes par
excellence de la guerre
de 1870. Certes, cette charge légendaire qui inspira les
peintres et les poètes et
fit frissonner d'orgueil la France entière, aura été
une grave faute tactique, bien
qu'elle ait aidé sur le moment, la droite de l'armée
française. En définitive, le
sacrifice de ces honunes n'a pas changé la face des
événements, mais a sauvé
l'honneur de l'armée française. L'intention n'est pas
de narrer les péripéties de
la bataille et particulièrement les assauts de Morsbronn
et d'Elsasshausen (car
des charges épiques, il y en a eu deux : celle du
général Michel à Morsbronn
aux environs de 13h30 et celle de Bonnemains à
Elsasshausen aux environs
de 15h30), cela a été souvent fait. Limitons nous à
quelques réflexions et
citations visant essentiellement à comprendre l'état
d'esprit de ces soldats,
étourdis de courage, se sachant sacrifiés d'avance et
qui néanmoins chargent
comme en une folie sublime.
Ecoutons d'abord Mac-Mahon lui-rnême dans une
proclamation à l'armée :
"Soldats, dans la journée du 6 août, la fortune a
trompé votre courage ; mais
vous n'avez perdu vos positions qu'après une résistance
héroïque, qui n'a pas
duré moins de 9 heures. Vous étiez 35.000 combattants
contre 140.000, et vous
avez été accablés par le nombre. Dans ces conditions
une défaite est glorieuse,
et l'histoire dira qu'à la bataille de Reichshoffen, les
Français ont déployé
la plus grande valeur".

Modèle de casque de
cuirassiers en 1845.
En signant la longue liste des promotions dans la Légion
d'honneur, l'Empereur
disait " qu'il n'avait jamais signé aucun décret
d'aussi bon cur ".
Ce décret élevait les généraux Ducrot, de Lartigue,
Du Postis de Houlbec et
Michel au grade de grand officier. Il contenait en outre
dix promotions au
grade de commandeur, quarante-deux promotions à celui
d'officier,
cent quatre-vingt-quatorze nominations de chevaliers. Un
autre décret du
même jour conférait la médaille militaire à deux cent
trente-cinq sous-officiers
et soldats. Il y a peu de victoires après lesquelles on
ait distribué plus de
médailles et de croix d'honneur qu'après la défaite du
6 août ; mais on conviendra,
dit de Monzie, " que jamais aussi elles ne furent
mieux placées que sur la
poitrine de tous ces braves ".
Devant le monument érigé en l'année centenaire 1970,
ranimons avec émotion
la cendre immortelle de tous les héros qui recouvraient
le champ de bataille.
Que ce carnage nous sensibilise et fasse naître, ou
entretienne en nous un
sentiment d'horreur à l'égard de la guerre.
Source des informations : Société
d'histoire de Reichshoffen


ASPECT
DE REICHSHOFFEN EN 1890


Carte postée en juillet 1899
(cette photo date surement avant 1899, c'est l'une des
premières cartes postales
photographiée de Reichshoffen).
Au premier plan à gauche, la malterie avec sa cheminée
dont il ne reste plus grand
chose aujourd'hui.
Au second plan vers la droite de l'église, la tour
suédois (les alentours sont peu habités).
Collection privée de Mausolf G.

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